NOUVELLES - Mise à jour sur la préservation de la biodiversité

Publié le 22 mai 2024

Le monde est confronté à une crise de biodiversité sans précédent. En effet, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) souligne, entre autres, qu’un million d’espèces animales et végétales sont aujourd’hui menacées d’extinction, et que respectivement 75% et 66% des écosystèmes terrestres et marins ont été significativement modifiés par les activités humaines. Ce même organisme a identifié cinq facteurs responsables de la perte de biodiversité : les changements d’usage des terres et de la mer; l’exploitation directe de certains organismes; le changement climatique; la pollution et les espèces exotiques envahissantes.

Depuis la Conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15) qui s’est tenue en décembre 2022 à Montréal, plusieurs réglementations et initiatives d’investisseurs ont vu le jour. Nous pouvons par exemple mentionner l’initiative Nature Action 100, dont Æquo est membre. En septembre 2023, les 100 compagnies visées ont reçu une lettre expliquant les principales attentes des investisseurs. Les premiers dialogues auront lieu en 2024. Par ailleurs, nous soutenons l’initiative SPRING des PRI, qui se focalise sur l’arrêt et l’inversion de la perte de forêt et de la dégradation des sols ainsi que sur des pratiques de lobby alignées à ces objectifs .

Concernant les évolutions législatives importantes, les normes de divulgation européennes environnementales (ESRS) inscrites dans la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) ont été adoptées en juillet 2023 par la Commission européenne. La norme ESRS E4 concerne spécifiquement la biodiversité, et contient l’obligation pour les entreprises de divulguer des informations, entre autres, sur la stratégie de l’entreprise liée à la biodiversité, ses cibles et ses métriques, ainsi que les actions mises en place.

De plus, en 2023, la Taskforce on Nature-related Financial Disclosure (TNFD) a publié sa première version finale des recommandations et orientations en matière de divulgation liée à la nature. Les entreprises et institutions financières peuvent maintenant évaluer, divulguer et mettre en place des actions quant à leurs dépendances, impacts, risques et opportunités liés à la nature. La divulgation se base sur 4 piliers : la gouvernance, la stratégie, la gestion des risques et des impacts ainsi que les métriques et cibles. Alors que la biodiversité est en crise et que plus de la moitié du PIB mondial dépend de la nature, de nombreuses compagnies n’ont pas encore pris de mesures en faveur de la protection de la biodiversité. En effet, le Carbon Disclosure Project (CDP) a analysé en 2022 que bien que 31% des compagnies se sont engagées publiquement ou ont soutenu des initiatives liées à la biodiversité, 55% des compagnies n’ont pas pris d’action pour remplir leurs engagements et 70% des compagnies n’évaluent pas les impacts de leur chaîne de valeur sur la biodiversité. Nous avons besoin d’informations concrètes sur les impacts, dépendances, risques et opportunités liées à la biodiversité, ainsi que des objectifs clairs et mesurables et des actions permettant de stopper et renverser la perte de biodiversité.

Pour cela, nous demandons dans un premier temps aux compagnies de développer une approche globale liée à la biodiversité, notamment par le biais :

  • D’une analyse des impacts, dépendances, risques et opportunités liés à la nature dans les opérations et la chaîne de valeur.
  • De l’adoption de cibles qui permettent de stopper et inverser la perte de biodiversité d’ici 2030.
  • De la mise en place d’un plan d’action pour atteindre ces cibles.

 

Lutter contre la déforestation

La déforestation occupe une place centrale parmi les enjeux liés à la biodiversité et au climat puisqu’elle décime les forêts tropicales qui abritent 80 % de la biodiversité terrestre et est responsable de 11 % des émissions mondiales de GES.

En 2023, de nouvelles réglementations pour lutter contre la déforestation ont vu le jour. À titre d’exemple, le règlement de l’Union européenne relatif à la mise à disposition sur le marché de l’Union et à l’exportation à partir de l’Union de certains produits de base et produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts (EUDR) vise à interdire la commercialisation des marchandises et produits dérivés de plusieurs matières premières (bovins, cacao, café, palmier à huile, soja et bois ou produits dérivés de ces derniers) si ces matières sont issues de terres déboisées ou de forêts dégradées. Il est considéré comme étant le règlement le plus ambitieux existant actuellement pour lutter contre la déforestation. En effet, toutes les entreprises commercialisant leurs produits dans l’Union européenne doivent mettre en place un processus de diligence raisonnable pour s’assurer de l’absence de déforestation dans leurs opérations et leur chaîne d’approvisionnement.

D’après le rapport Global Forest Report du Carbon Disclosure Project (CDP), 84% des entreprises ayant répondu au questionnaire Forêt du CDP qui ont entrepris une évaluation des risques pour un produit spécifique ont identifié des risques liés à la déforestation. Toutefois, seulement 12% des entreprises déclarent être sur la bonne voie pour éradiquer la déforestation. De plus, seulement 3% des compagnies répondant au questionnaire Forêt du CDP procèdent à une évaluation complète des risques liés aux forêts et cartographient les lieux d’opérations de leurs fournisseurs.

Ainsi, sur la question de la déforestation, nous demandons aux compagnies de mettre en place les mesures suivantes dans leurs opérations et leur chaîne d’approvisionnement :

  • Divulguer de l’information sur les processus de gestion des risques et la traçabilité liée à la déforestation
  • Divulguer des mesures prises pour lutter contre la déforestation
  • Divulguer des cibles zéro déforestation et zéro conversion couvrant toutes les commodités à haut risque telles que celle du boeuf, de l’huile de palme, du cacao et du soja

Exemples de progressions en matière de protection de la biodiversité

  • Réduction du plastique : CVS Health, McDonald’s, Target et Dollar General ont progressé vers l’adoption d’objectifs de réduction de plastique à usage unique et d’emballage non nécessaire.
  • Reddition de compte : Alibaba et Nutrien considèrent aligner leur divulgation aux normes du TNFD.
  • Déforestation : Carrefour a progressé vers la divulgation de plus d’informations sur les mesures prises pour lutter contre la déforestation.
  • Réduction de l’impact sur la biodiversité : Ahold Delhaize a travaillé sur une nouvelle approche qui intégrera une révision des cibles ainsi qu’un plan d’action pour réduire les impacts sur la biodiversité.

 

Marine Martal, conseillère en engagement actionnarial

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